Édition du lundi 5 décembre 2005
Les violences urbaines laissent aux assureurs une facture de 200 millions d'euros
Les violences urbaines en France entre le 27 octobre et le 17 novembre ont laissé une facture pour les compagnies d'assurance estimée à environ 200 millions d'euros, montant qu'elles sont bien décidées à se faire rembourser par l'Etat.
Selon le dernier pointage effectué par la Fédération française des sociétés d'assurances (FFSA), le montant total des dégâts assurés correspond finalement à l'estimation faite dès le 10 novembre. Mais le coût pour les seuls véhicules (environ 9.000 incendiés) a légèrement augmenté à 23 M EUR, contre 20 M EUR évalués initialement.
La mutuelle des collectivités locales (Smacl) a notamment revu à la baisse sa propre exposition autour de 50 millions d'euros, au lieu des 60 millions anticipés au vu des seules déclarations de ses assurés.
«Nos experts se sont rendus compte sur place que certains bâtiments déclarés entièrement détruits ne l'étaient en fait que partiellement», explique un porte-parole de la mutuelle.
Reste que la plupart des assureurs se préparent déjà à engager les procédures auprès des tribunaux administratifs pour obtenir de l'Etat le remboursement des sommes qu'ils auront versés à leurs assurés.
En effet, la FFSA et le Groupement des entreprises mutuelles d'assurances (Gema) ont très rapidement demandé aux pouvoirs publics la mise en place d'un dispositif exceptionnel de prise en charge des dégâts.
Ils attendent toujours une réponse mais les récents propos du Premier ministre Dominique de Villepin qui a qualifié les événements de «graves troubles sociaux» et non d'«émeutes», leur laisse peu d'espoir.
«Le choix des mots n'est pas neutre : en qualifiant de graves troubles sociaux les récentes violences urbaines, le gouvernement a probablement voulu indiquer aux assureurs qu'il n'avait pas l'intention de reconnaître sa responsabilité», a déclaré dans un entretien à l'AFP Jean-Luc de Boissieu, secrétaire général du Gema.
Une loi de 1983 stipule que l'Etat «est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis à force ouverte ou par violence par des attroupements et rassemblements armés soit contre les personnes, soit contre les biens». Mais la décision appartient au juge administratif.
«Les tribunaux administratifs vont être submergés car il faut faire un recours par dossier», prévient un assureur d'envergure. La France compte 37 tribunaux administratifs.
La Smacl précise, pour sa part, qu'«il ne fait aucun doute que tous les dossiers feront l'objet d'un recours». Avant de se tourner vers la justice, la mutuelle entend faire «une proposition de règlement amiable globale auprès de l'Etat», a-t-on précisé.
Mais les procédures auprès de la justice administrative peuvent prendre jusqu'à 10 ans. Une prise en charge exceptionnelle par l'Etat serait beaucoup plus rapide et bénéficierait en premier lieu aux collectivités locales.
«Si l'Etat s'engage, la donne sera complètement changée avec nos réassureurs et donc avec nos assurés», explique la Smacl.
Faute de quoi, les primes des collectivités locales pourraient subir jusqu'à 30% d'augmentation lors des prochains renouvellements des contrats.
Cette branche souffre déjà d'une forte inflation des cotisations et d'une réduction de l'offre d'assurance.
Pour les particuliers, les compagnies d'assurance affirment que les violences urbaines n'auront pas d'impact sur les cotisations.
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